En bref…
CAA Nantes, 17 sept. 2021,
n° 20NT02572, Cne du Loroux- Bottereau
Si le CGPPP ne l’interdit pas (v. art. L. 1111- 1. Pour un état des lieux récents, v. en particulier J.-Fr. Giacuzzo, Les voies étroites de l’acquisition d’immeubles publics en Vefa : RDI 2021, p. 325), le recours à la VEFA par les personnes publiques constitue l’une des chausse- trappes les plus classiques de l’achat public (v. récemment CAA Nancy, 15 avr. 2021, n° 19NC02073 : Contrats-Marchés publ. 2021, comm. 169, obs. Hoepffner ; AJCT 2021, p. 423, obs. Dreyfus ; Dr. Voirie 2021, p. 180, obs. Yolka).
D’une part en ce qu’il heurte potentiellement le droit de la maîtrise d’ouvrage public (v. CCP, art. L. 2411-1, ce dernier imposant qu’elle soit assurée par la personne publique dès lors que l’ouvrage construit doit devenir sa pleine propriété) ; d’autre part, en ce qu’il est susceptible de tordre le droit de la commande publique, la requalification en marchés publics de travaux étant susceptible d’affleurer si l’ouvrage a répondu « aux exigences fixées par l’acheteur qui exerce une influence déterminante sur sa nature ou sa conception»(CCP,art. L. 1111-2, 2°), la Cour de justice de l’Union européenne ayant récemment eu à préciser cette notion (CJUE, 22 avr. 2021, n° C-537/19, Commission c/ Autriche : Contrats-Marchés publ. 2021, comm. 202, obs. Zimmer ; Europe 2021, comm. 209, obs. Tribout ; JCP A 2021, 2286, obs. Ducloyer ; AJCT 2021, p. 426, obs. Dreyfus ; BJCP 2021, n° 137, p. 270, concl. Campos Sanchez-Bordona, obs. Nicinski).
Cette porte étroite est ainsi susceptible de se refermer en présence de trois critères (CE, sect., 8 févr. 1991, n° 57679 : Lebon, p. 41 ; RD publ. 1991, p. 1137, obs. J.-M. Auby ; AJDA 1991, p. 579, obs. Delcros ; D. 1991, p. 373, obs. Terneyre ; RDI 1991, p. 204, obs. Llorens et Terneyre ; RFDA 1992, p. 48, concl. Pochard ; CJEG 1991, p. 251, chron. Llorens ; GDDAB, 3e éd., Dalloz, 2018, n° 17, obs. Noguellou) – que la jurisprudence a finalement rendu cumulatifs (CE, avis, 31 janv. 1995 : EDCE, 1995, p. 307) – rappelés ici, à savoir « lorsque l’objet de l’opération est la construction même pour le compte de la collectivité d’un immeuble entièrement destiné à devenir sa propriété et conçu en fonction de ses besoins propres ».
En l’espèce, la commune du Loroux-Botterau avait par délibération acté l’acquisition en Vefa d’environ 1 000 m2 d’un immeuble (qui en comptait un peu plus du double). Plusieurs éléments jouaient en faveur d’une requalification éventuelle en marché de travaux : premièrement, le terrain d’assiette de l’ouvrage avait été préalablement cédé par la collectivité (acheteuse en Vefa) à l’entreprise de BTP, la formule ressemblant à un montage aller-retour (prohibé) d’un nouveau genre ; deuxièmement, le projet immobilier avait été élaboré en concertation avec celle-ci, l’essentiel des locaux étant destinés à l’accueil de commerçants et de praticiens de la santé ainsi qu’à la construction de logements en faveur de personnes âgées ou handicapées ; troisièmement, ce projet avait été impulsé par la collectivité elle-même (qui souhaitaient attirer ces professionnels), circonstance faisant du reste, ici, l’objet d’un contrôle au regard de l’arrêt Ordre des avocats au barreau de Paris (CE, ass., 31 mai 2006, n° 275531 : Lebon, p. 272 ; BJCP 2006, p. 295 ; CJEG 2006, p. 430 et RFDA 2006, p. 1048, concl. Casas ; AJDA 2006, p. 1584, chron. F. Landais et F. Lénica ; Contrats-Marchés publ. 2006, comm. 222, obs. Eckert ; JCP A 2006, 113, obs. Linditch ; Gaz. Pal. 7 déc. 2006, p. 7, obs. Renaudie).
La cour administrative d’appel de Nancy vient toutefois juger que l’achat en VEFA ne portait que sur une partie, seulement, de l’immeuble édifié, ce dernier ayant par ailleurs principalement entendu répondre aux besoins (spécifiés) des professionnels de santé et commerçants. En somme répondre aux besoins d’une opération d’initiative publique n’équivaut pas à répondre aux besoins de la personne publique elle-même. Par voie de conséquence, la délibération contestée était donc légale autant que le recours à la Vefa.

Christophe Roux
Professeur de droit public
Directeur de l’EDPL (EA 666) Université Jean Moulin – Lyon 3