Domaine : Novembre / Décembre 2022

Actualité

Des concessions funéraires

La gestion des concessions funéraires n’est pas de tout repos (v. infra, p. 181, pour une illustration) et donne lieu à de multiples interrogations, notamment lorsqu’elles ne sont pas renouvelées, ou du moins pas dans les temps. Dans une réponse au sénateur Masson (Rép. min. à QE n° 01287 : JO Sénat 3 nov. 2022), le ministère de l’intérieur rappelle en préambule que « les concessions temporaires, les concessions trentenaires et les concessions cinquantenaires sont renouvelables au prix du tarif en vigueur au moment du renouvellement. À défaut du paiement de cette nouvelle redevance, le terrain concédé fait retour à la commune. Il ne peut cependant être repris par elle que deux années révolues après l’expiration de la période pour laquelle le terrain a été concédé. Dans l’intervalle de ces deux années, les concessionnaires ou leurs ayants cause peuvent user de leur droit de renouvellement ». En conséquence, « une demande de renouvellement présentée dans ce délai ne peut donc faire l’objet d’un refus par la commune, dont les obligations ont été renforcées par la loi du 21 février 2022. Celle-ci est en effet tenue d’informer par tout moyen les ayants droits de leur droit de renouvellement de la concession, la loi ayant tiré les conséquences de la jurisprudence du Conseil d’État, qui avait conclu à l’existence de cette obligation d’information à la charge des communes, corollaire de l’exercice du droit de renouvellement (CE, 11 mars 2020, n° 436693, Cne d’Épinal) ».

Répondant plus précisément à la question posée, il ajoute qu’en revanche, « au-delà de ce délai de deux ans et en l’absence de renouvellement, si les ayants droits, dûment informés par la commune, n’ont pas exercé leur droit, le terrain concédé fait retour à la commune sans formalité particulière (CE, 20 janv. 1988, n° 68454). Le renouvellement n’est donc plus de droit, même si la commune n’a pas procédé aux opérations matérielles de reprise de la concession. Dans ce dernier cas, la commune dispose de la possibilité, mais n’a pas l’obligation, de proposer une prolongation de jouissance aux concessionnaires ou à leurs ayants droits, si ceux-ci en font la demande au- delà du délai prescrit par la loi ».

Dans le cas où les familles ont renoncé à leur droit de renouvellement, le ministère de la transition écologique rappelle au même sénateur, en réponse à une autre de ses questions que, lorsqu’il est nécessaire de procéder à l’exhumation du corps du ou des défunts présents dans cette concession afin de pouvoir la réattribuer, « le maire peut‘‘faire procéder à la crémation des restes exhumés, en l’absence d’opposition connue ou attestée du défunt’’(CGCG, art. L. 2223-4). Il peut ainsi décider de placer les cendres issues de la crémation dans un columbarium, ou faire procéder à leur dispersion dans le lieu spécialement affecté à cet effet dans le cimetière (CGCT, art. R. 2223-9). Les restes mortels des personnes opposées à la crémation sont obligatoirement déposés à l’ossuaire communal. La procédure prévue à l’article L. 2223-4 du CGCT est également applicable aux reprises de concessions en état d’abandon ». Répondant plus précisément à l’interrogation posée, il indique que « les reprises de ces concessions ont un caractère purement administratif et sont donc à l’entière charge des communes, notamment en ce qui concerne les frais d’exhumation de corps, de crémation, ou, en cas d’opposition connue ou attestée des défunts, de reliquaire permettant le placement du corps à l’ossuaire communal » (Rép. min. à QE n° 01288 [Masson] : JO Sénat 3 nov. 2022). Enfin, s’agissant cette fois de la reprise des concessions en état d’abandon, le ministère chargé des collectivités territoriales souligne que le décret n° 2022-1127 du 5 août 2022 portant diverses me- sures relatives à la réglementation funéraire – pris en application de l’article 237 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant di- verses mesures de simplification de l’action publique locale –« actualise, dans la partie réglementaire du code général des collectivités territoriales, le délai obligatoirement laissé par la commune après l’exécution des formalités de publicité du procès-verbal constatant l’abandon d’une concession funéraire, qui passe de trois à un an » (Rép. min. à SE n° 00061 [Lefèvre] : JO Sénat, 3 nov. 2022).


La responsabilité, un terrain glissant

Qui doit effectuer des travaux de consolidation d’un talus, appartenant au département, susceptible de glisser et de fragiliser le terrain situé au-dessus, le tout étant en surplomb d’une route départementale ? Le département ou le propriétaire de la parcelle en surplomb, s’enquiert le sénateur Jean-Louis Masson.

« Si le talus en déblai participe à la protection de la route départementale et fait ainsi partie du domaine routier départemental, alors sa consolidation doit être prise en charge par le département », répond d’abord le ministère, après avoir rappelé, d’une part, que « le département a une obligation d’entretien de son domaine public routier (C. voirie routière, art. L.131-2), et d’autre part qu’ « un talus nécessaire au soutien de la chaussée ou à sa protection constitue une dépendance du domaine public routier (CE, 5 mai 2010, n° 327239) », ledit talus « ayant cette fonction est qualifié d’accessoire indissociable à l’uti- lisation de la voie en application de l’article L. 2111- 2 du code général de la propriété des personnes publiques ». Et « si, en revanche, le talus n’est pas nécessaire à l’usage de la voie, il relève du domaine privé du département, régi par les règles relatives à la responsabilité civile », complète-t-il ensuite (Rép. min. à QE n° 02067 : JO Sénat 6 oct. 2022).


De l’entretien des passerelles au-dessus d’un cours d’eau ?

« Le statut de la passerelle en surplomb d’un cours d’eau, qui ne constitue pas la continuation d’une voie publique et n’en suit donc pas le régime de propriété, dépend de la propriété du cours d’eau », indique au sénateur Masson le ministère de la transition écologique (Rép. min. à QE n° 01753 : JO Sénat 6 oct. 2022). « En effet, le surplomb du domaine public ou du domaine privé d’une commune ou d’une propriété privée est présumé faire partie intégrante de la propriété du sol (la passerelle au-dessus d’une voie publique communale est présumée appartenir à la commune, Cass. 3e civ. 3 juill. 2013, n° 12- 20.237). Il convient de distinguer les cours d’eau domaniaux et non-domaniaux. En application de l’article L. 2111-7 du code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP), un cours d’eau fait partie du domaine public fluvial d’une personne publique s’il a été classé. Le classement résulte de la poursuite de motifs d’intérêt général listés à l’article L. 2111-12 du CGPPP, comme la navigation ou l’alimentation en eau, qui ne concernent pas en principe les petits cours d’eau. Si, toutefois, le ruisseau a été classé, la personne publique propriétaire est responsable de la passerelle et doit pourvoir à son entretien. En présence de deux propriétaires riverains d’un cours d’eau non-domanial, l’article L. 215-2 du code de l’environnement prévoit que le lit du cours d’eau appartient pour moitié à chacun des propriétaires des deux rives ‘‘suivant une ligne que l’on suppose tracée au milieu du cours d’eau sauf titre ou prescription contraire’’. Par conséquent, la commune et le propriétaire riverain sont chacun propriétaire d’une partie de la passerelle qui relèvera, s’agissant de la commune, de son domaine privé. L’entretien de la passerelle et son régime de responsabilité sont alors régis par le droit privé. Il y a lieu également de prendre en considération que la passerelle pourrait constituer une aisance de voirie si elle constitue le seul moyen d’accès à la voie publique. Les travaux nécessaires à une aisance de voirie, accessoire du droit de propriété, relèvent de la responsabilité du gestionnaire du domaine routier dont la prise en charge du coût de réalisation et d’entretien est à déterminer entre la collectivité et le riverain (CE, 15 déc. 2016, n° 388335). En l’absence de convention, la collectivité reste responsable de son ouvrage. »


Des limites du troc en matière domaniale

« Une commune ne peut ni grever, par anticipation, une partie de son futur domaine public d’un droit de jouissance privatif gratuit, ni perdre la maîtrise de l’affectation de son domaine public en garantissant que sa propriété soit durablement affectée à un parking », rappelle le ministère de la transition éco- logique au sénateur Masson, qui l’interrogeait sur la possibilité pour une commune d’acquérir au franc symbolique un terrain pour en faire un parking public, moyennant le double engagement aux cédants de leur garantir une partie des places de stationnement d’une part, et de ne jamais leur demander de redevance de stationnement d’autre part. Le ministère ajoute que « si l’article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales permet en tout ou partie au maire de réserver des places de stationnement dans des cas limités, par exemple pour les personnes handicapées, le principe d’égalité des usagers du service public interdit que ce service (ou le domaine public) soit réservé à une personne pour la seule raison qu’elle a participé à son financement. Au demeurant, l’article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques prévoit que ‘‘toute occupation ou utilisation du domaine public d’une personne publique (…) donne lieu au paiement d’une redevance’’, sauf dans les cas énumérés de manière limitative par cette disposition qui ne correspondent pas à l’objet de la présente question écrite. Il s’en déduit qu’une commune ne saurait prendre l’engagement de grever son domaine public et de le mettre à dis- position gratuitement d’un particulier » (Rép. min. à QE n° 01925 : JO Sénat 6 oct. 2022).


Des nuances de la redevance d’occupation du domaine public

Une commune peut-elle consentir une autorisation d’occupation privative du domaine public à titre gratuit, pendant une période de quatre mois pour le lancement d’une activité commerciale, interroge le sénateur Masson. Non, répond d’abord le ministère de la transition écologique : « L’article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques dispose que toute occupation ou utilisation du domaine public donne lieu au versement d’une redevance, sauf exceptions limitativement énumérées dans cette disposition qui ne couvrent pas le cas du lancement d’une activité économique. Cette disposition consacre le principe de non-gratuité des autorisations d’occupation du domaine afin de valoriser le patrimoine des personnes publiques. Aucune exonération de la redevance, même à titre temporaire et pour une durée brève de quatre mois, ne peut être accordée en dehors des exceptions prévues par la loi ». Avant de nuancer son propos : « Cependant, les organes délibérants des collectivités territoriales disposent de la faculté de moduler le montant de la redevance d’occupation du domaine public. En effet, en vertu de l’article L. 2125-3 du code général des collectivités territoriales, le montant de la redevance doit présenter un lien d’adéquation avec les avantages dont bénéficie l’occupant. Pour une activité économique, il est d’usage que la redevance présente une part fixe au titre de l’occupation du domaine et une part variable en fonction des gains générés par l’activité. L’organe délibérant peut également, dans le respect du principe d’égalité, décider de baisser le montant de la redevance en s’appuyant sur des critères objectifs, tels l’absence de possibilité d’exploitation ou la perte de chiffre d’affaires ». (Rép. min. à QE n° 01895 : JO Sénat 6 oct. 2022).