De l’indemnisation de la perte d’un bien, détenu de bonne foi, restitué au domaine public

Cours & Tribunaux

CE, 22 juill. 2022, n° 458590, Ministre de la Culture : Lebon

Il découle des stipulations de l’article 1er du protocole additionnel à la Conv. EDH que si, en vertu du principe désormais énoncé à l’article L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques, les biens qui relèvent du domaine public des personnes publiques sont inaliénables et imprescriptibles, le détenteur de bonne foi d’un bien appartenant au domaine public dont la restitution est ordonnée peut prétendre à la réparation du préjudice lié à la perte d’un intérêt patrimonial à jouir de ce bien, lorsqu’il résulte de l’ensemble des circonstances dans lesquelles cette restitution a été ordonnée que cette personne supporterait, de ce fait, une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l’objectif d’intérêt général poursuivi. Alors même que le détenteur de bonne foi tenu à l’obligation de restitution ne justifierait pas d’une telle charge spéciale et exorbitante, il peut prétendre, le cas échéant, à l’indemnisation des dépenses nécessaires à la conservation du bien qu’il a pu être conduit à exposer ainsi que, en cas de faute de l’administration, à l’indemnisation de tout préjudice directement causé par cette faute.


CONCLUSIONS

« Peut-on encore vendre des biens de l’Église » ? Tel était le titre d’une table-ronde organisée il y a quelques mois par un célèbre hôtel de ventes parisien, après l’émoi suscité dans le marché de l’art par plusieurs décisions de l’État revendiquant la restitution de biens de l’Église détenus de bonne foi par des collectionneurs privés au motif que ces biens appartenaient au domaine public de l’État. Vous avez eu à connaître de deux de ces décisions, relatives d’une part au pleurant n° 17 ornant la tombe de Philippe le Hardi dans la chartreuse de Champmol 1, d’autre part, au fragment à l’aigle du jubé de la cathédrale de Chartres 2, et en avez confirmé la légalité.

Vous êtes désormais saisis de la question inédite de savoir si les détenteurs de bonne foi de biens ainsi revendiqués par l’État peuvent prétendre à une indemnisation du préjudice résultant pour eux d’une telle restitution. Votre réponse est d’autant plus attendue que cette question est également pendante devant la Cour européenne des droits de l’Homme, saisie par les détenteurs lésés du pleurant n° 17 et du fragment à l’aigle du jubé de la cathédrale de Chartres.

Le requérant avait en sa possession un manuscrit de l’École napolitaine exécuté dans les années 1480 à destination de la collection des rois d’Aragon. Ce manuscrit, décrit comme un chef-d’œuvre calligraphique de l’école italienne du Quattrocento, réalisé sur peau de truie fauve et composé de 283 feuillets de texte à l’écriture gothique italienne, renferme le texte Commentaria in evangelium sancti Lucae de Saint Thomas d’Aquin accompagné d’enluminures attribuées à Matteo Felice.

Provenant de la bibliothèque de la chartreuse de Bourbon-lès-Gaillon, ce manuscrit a été acquis par l’aïeul du requérant lors d’une vente aux enchères publiques organisée à l’hôtel Drouot à Paris en 1901. En 1991, le père du requérant a mis ce manuscrit ainsi que les 18 000 ouvrages composant la bibliothèque familiale en dépôt aux archives départementales de Maine-et-Loire, à Angers, afin de les rendre accessibles au public sur demande à des fins de recherches. Vingt-cinq ans plus tard, en 2016, le requérant, ayant hérité d’une partie des ouvrages en cause et, en particulier du manuscrit litigieux, en a sollicité la restitution auprès des archives départementales en vue de le vendre.

Dans le cadre de cette vente, prévue le 20 mai 2018, le requérant a, le 26 mars 2018, sollicité la délivrance du certificat requis par l’article L. 111-2 du code du patrimoine pour l’exportation hors du territoire national des biens culturels. Mais par une décision du 18 mai 2018, le ministre de la culture a rejeté cette demande comme irrecevable au motif que le manuscrit appartient au domaine public de l’État, en a ordonné le retrait de la vente aux enchères devant avoir lieu le surlendemain et a mis l’intéressé en demeure de le restituer à l’État.

Le requérant a alors saisi le tribunal administratif de Paris, d’une part, d’une demande d’annulation de cette décision, rejetée par un jugement du 17 juillet 2020 devenu définitif, d’autre part, d’une demande d’indemnisation en réparation des préjudices moral et financier subis du fait de la revendication de propriété par l’État du manuscrit qui était en possession de sa famille en toute bonne foi depuis plus de cent ans, rejetée par un jugement du même jour.

Saisie en appel par le requérant, la cour administrative d’appel de Paris, par un arrêt du 21 septembre 2021, a annulé ce jugement et, sur le fondement des stipulations de l’article 1er du Premier protocole à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, dit « article 1P1 », a condamné l’État à lui verser la somme de 25 000 € à titre d’indemnisation de la perte de son intérêt patrimonial à jouir de ce bien.

1. Avant d’en venir au pourvoi de la ministre et au pourvoi incident du requérant contre cet arrêt, deux précisions nous paraissent devoir être formulées.

Premièrement, l’appartenance au domaine public du manuscrit n’est plus en litige, le requérant ne contestant plus, ainsi que l’a jugé le tribunal administratif de Paris dans un jugement devenu définitif, qu’en vertu du décret de l’Assemblée constituante du 2 novembre 1789, aux termes duquel « tous les biens ecclésiastiques sont à la disposition de la nation », le manuscrit qui était conservé à la bibliothèque de la chartreuse de Bourbon-lès-Gaillon jusqu’en 1789 a été incorporé au domaine national et, depuis, au domaine public. Le litige ne porte donc plus que sur l’indemnisation de l’éventuel préjudice résultant pour le requérant, détenteur du manuscrit, de sa restitution à l’État.

À cet égard et deuxièmement, l’appartenance d’un bien au domaine public ne s’oppose pas par principe à toute forme d’indemnisation des préjudices subis par son détenteur. Vous avez ainsi admis, d’une part, sur le terrain de la responsabilité pour faute de l’État, la possibilité pour l’exploitant d’un bien appartenant au domaine public d’être indemnisé des dépenses qu’il a engagées pour l’exploitation de ce bien ainsi que des préjudices commerciaux et, le cas échéant, financiers résultant directement de la faute commise par l’autorité gestionnaire du domaine public en l’induisant en erreur sur l’étendue de ses droits, en l’occurrence par la conclusion illégale d’un bail commercial en lieu et place d’une convention d’occupation domaniale précaire 3.

D’autre part, vous jugez, sur le terrain de la responsabilité sans faute, que les dépenses exposées par une personne privée pour l’entretien d’un bien appartenant au domaine public peuvent ouvrir droit à une indemnisation de l’intéressé à raison de l’enrichissement sans cause que les frais ainsi engagés ont procuré à la personne publique 4.

En l’espèce, le litige ne porte ni sur la responsabilité pour faute de l’État à avoir induit en erreur, de manière fautive, le requérant sur la propriété du manuscrit, ni sur l’enrichissement sans cause de l’État du fait des dépenses engagées par l’intéressé pour la préservation du manuscrit, mais seulement sur l’indemnisation, au titre de la responsabilité sans faute de l’État pour rupture de l’égalité devant les charges publiques, du préjudice résultant pour le requérant de la privation de la jouissance du manuscrit du fait de son appartenance au domaine public.

2. Venons-en donc à ce préjudice, dont la cour a admis l’indemnisation sur le fondement des stipulations de l’article 1P1 précité. Nous vous dirons d’emblée que dès lors que vous acceptez de considérer que l’intérêt patrimonial d’un particulier détenteur d’une œuvre appartenant au domaine public à en jouir peut constituer un bien au sens de ces stipulations, étape que vous avez franchie par votre décision Société Pierre-Bergé et associés et autres du 21 juin 2018 5, nous ne voyons aucune raison d’écarter par principe, comme vous y invite la ministre par le premier moyen de son pourvoi, toute indemnisation de la perte de cet intérêt patrimonial.

À cet égard, la CEDH juge de manière constante que la notion de bien au sens de ces stipulations a une portée autonome, indépendante des qualifications formelles du droit interne, qui ne se limite pas à la propriété de biens corporels. En particulier, en matière de domaine public, elle a précisé qu’une possession de fait pouvait relever du champ d’application de l’article 1P1, en jugeant qu’en l’absence même de tout droit réel sur le domaine public, le temps écoulé avait fait naître l’existence d’un intérêt patrimonial des requérants à jouir des maisons qui y étaient implantées, intérêt suffisamment reconnu et important pour constituer un bien au sens du 1P1 6.

Vous avez transposé cette jurisprudence au domaine public mobilier. Dans une configuration très proche de notre cas d’espèce, saisis de la restitution à l’État du « pleurant n° 17 », une statue d’albâtre de pleurant étanchant ses larmes qui ornait le tombeau de Philippe le Hardi dans l’oratoire de la chartreuse de Champmol, en possession d’une même famille depuis près de deux siècles, vous avez reconnu, dans les circonstances de l’espèce, compte tenu notamment de la durée pendant laquelle la statuette litigieuse avait été détenue par les requérantes sans initiative de l’État pour la récupérer, l’existence d’un intérêt patrimonial à en jouir, suffisamment reconnu et important pour constituer un bien au sens des stipulations de l’article 1P1 (décision Sté Pierre Bergé et associés et a. précitée).

Vous ne vous êtes en revanche alors pas prononcé sur la nécessité, dans une telle hypothèse, de prévoir une indemnisation des détenteurs de bonne foi de l’œuvre restituée.

Rappelons qu’aux termes de la jurisprudence constante de la CEDH, l’article 1P1 « contient trois normes distinctes. La première, qui […] revêt un caractère général, énonce le principe du respect de la propriété. La deuxième […] vise la privation de propriété et la soumet à certaines conditions. Quant à la troisième […], elle reconnaît aux États le pouvoir, entre autres, de réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général », les deuxième et troisième normes ayant « trait à des exemples particuliers d’atteintes au droit de propriété » 7.

Pour que des atteintes aux biens soient compatibles avec les stipulations de l’article 1P1, la CEDH exige que ces atteintes se conforment au principe de légalité et poursuivent un but légitime par des moyens présentant un rapport raisonnable de proportionnalité avec le but visé. Elle vérifie ainsi qu’est ménagé un juste équilibre entre les exigences de l’intérêt général et les impératifs de la sauvegarde des droits fondamentaux de l’individu 8. L’appréciation qu’elle porte sur une telle atteinte dépend notamment de sa nature et, en particulier, de la question de savoir s’il s’agit d’une privation de propriété, au sens de la deuxième phrase de l’article 1P1, ou d’une règlementation de l’usage des biens au sens de sa troisième phrase. Dans ce cadre, elle n’exige par principe d’indemnisation qu’en cas de privation de propriété et non en cas de règlementation de l’usage des biens, l’absence d’indemnisation étant alors l’un des facteurs à prendre en compte pour établir si un juste équilibre a été respecté mais ne pouvant, à elle seule, être constitutive d’une violation de l’article 1P1 9.

À l’appui de son pourvoi, la ministre fait valoir que l’atteinte portée au « bien » du requérant, dont elle ne conteste pas l’existence, résulte d’une règlementation de l’usage des biens et non d’une privation du droit de propriété de sorte qu’elle ne devrait ouvrir droit à aucune indemnisation de l’éventuel préjudice en résultant. Elle se prévaut à ce titre des arrêts Depalle et Brosset-Triboulet précités dans lesquels la CEDH a jugé que compte tenu des principes régissant le domaine public, d’une part, l’ingérence en cause, à savoir le refus des autorités françaises d’autoriser les requérants à continuer d’occuper une parcelle du domaine public sur laquelle était édifiée une maison leur appartenant et l’injonction de la détruire, ne constituait pas une privation du droit de propriété mais une règlementation de l’usage des biens, d’autre part, l’absence d’indemnisation n’était pas disproportionnée.

En l’espèce, s’il ne fait guère de doute que la restitution du manuscrit ne saurait s’analyser comme une privation de propriété, son appartenance au domaine public n’ayant jamais cessé, nous peinons à y voir une règlementation de l’usage des biens, puisqu’à la différence des mesures en litige dans les affaires Depalle et Brosset-Triboulet précitées, qui portaient sur des biens édifiés sur le domaine public, dont l’usage n’était pas exclu par principe mais autorisé dans les limites des règles de la domanialité publique, la mesure en cause prive directement les détenteurs du bien domanial de tout usage de ce bien.

Or lorsque les mesures qui ont porté atteinte aux droits du requérant ne peuvent être qualifiées ni de privation de propriété ni de réglementation de l’usage d’un bien, la CEDH les interprète à la lumière du principe général du respect des « biens », ainsi qu’elle l’a fait dans une configuration comparable à notre cas d’espèce, s’agissant de l’exercice par l’État de son droit de préemption pour l’acquisition d’un tableau de van Gogh 10, solution que vous avez à votre tour retenue dans l’affaire du « pleurant n° 17 ».

Dans cette affaire, si vous avez jugé, après avoir reconnu l’existence d’un intérêt patrimonial des requérantes à jouir de la statuette litigieuse, que la reconnaissance de son appartenance au domaine public justifiait qu’elle soit rendue à son propriétaire, l’État, sans que soit méconnue l’exigence de respect d’un juste équilibre entre les intérêts privés de ses détenteurs et l’intérêt public majeur qui s’attache à la protection de cette œuvre d’art, vous ne vous êtes pas pour autant prononcés sur la nécessité, pour assurer cet équilibre, de prévoir, au regard des circonstances de l’espèce, une indemnisation.

En effet, si Édouard Crépey estimait alors dans ses conclusions que cet équilibre était assuré même en l’absence d’indemnisation, d’une part, le litige dont vous étiez saisis ne portait que sur la légalité de la décision de restitution et non sur l’éventuelle indemnisation du préjudice en résultant pour les requérantes. D’autre part, votre décision ne reprend pas la précision suggérée par le rapporteur public tenant à l’absence d’indemnisation, de sorte qu’elle ne peut être lue comme en excluant le principe. D’autant que vous jugez qu’il résulte des principes qui gouvernent l’engagement de la responsabilité sans faute de l’État que le silence d’une loi sur les conséquences que peut comporter sa mise en œuvre ne saurait être interprété comme excluant, par principe, tout droit à réparation des préjudices que son application est susceptible de provoquer, de sorte que la circonstance que la loi ne prévoit pas d’indemnisation ne saurait l’entacher d’inconventionalité 11.

Dans ces conditions, au vu tant de la jurisprudence précitée de la CEDH que de votre décision Société Pierre-Bergé et associés, c’est sans erreur de droit qu’après avoir constaté que le requérant devait être regardé comme disposant d’un intérêt patrimonial à jouir du manuscrit litigieux, suffisamment reconnu et important pour constituer un bien au sens des stipulations du 1P1, puis rappelé, conformément à cette dernière décision, que la reconnaissance de l’appartenance au domaine public du manuscrit justifiait qu’il soit rendu à l’État, sans que soit méconnue l’exigence de respect d’un juste équilibre entre les intérêts privés de ses détenteurs et l’intérêt public majeur qui s’attache à la protection de cette œuvre d’art, la cour a précisé que cet intérêt public majeur n’impliquait pas nécessairement que sa restitution à l’État ne puisse s’accompagner du versement à son détenteur d’une indemnité en réparation du préjudice résultant de la perte de son intérêt patrimonial à en jouir.

3. Si vous nous suivez pour admettre, à l’instar de la cour, la possibilité pour le détenteur de bonne foi d’une œuvre appartenant au domaine public d’obtenir la réparation d’un tel préjudice, reste à déterminer, d’une part, les conditions ouvrant droit à cette réparation, d’autre part, la consistance du préjudice ainsi indemnisable.

3.1. Votre jurisprudence a consacré, schématiquement 12, deux régimes distincts de responsabilité sans faute pour rupture de l’égalité devant les charges publiques : le régime de droit commun, ouvert en cas de dommage « anormal et spécial », et un régime propre aux servitudes d’urbanisme, ouvrant la voie à une indemnisation des propriétaires, « dans le cas exceptionnel » où ils supportent une « une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l’objectif d’intérêt général poursuivi » 13. Ce second régime, plus restrictif que le régime de droit commun, vous a été inspiré par la nécessité d’assurer la compatibilité avec les stipulations de l’article 1P1 de l’ancien article L. 160-5 du code de l’urbanisme, qui fait obstacle à l’indemnisation de l’institution de servitudes d’urbanisme sauf dans des hypothèses très limitatives.

La ministre de la culture estime que c’est ce régime dit Bitouzet qui doit s’appliquer en cas d’indemnisation de la restitution à l’État d’un bien appartenant au domaine public, tandis que le requérant fait valoir qu’en l’absence de disposition faisant obstacle, comme l’article L. 160-5 du code de l’urbanisme, à la mise en œuvre de la responsabilité sans faute de droit commun pour rupture de l’égalité devant les charges publiques, celle-ci doit trouver à s’appliquer.

Vous n’avez à ce jour à notre connaissance jamais été amenés à vous prononcer sur l’existence d’un préjudice anormal et spécial résultant d’une rupture d’égalité devant les charges publiques du fait d’une mesure de réglementation de l’usage du domaine public ou de privation de l’usage d’un bien domanial. Vous avez en revanche transposé votre jurisprudence Bitouzet en matière de domanialité publique à l’hypothèse de l’incorporation d’une parcelle dans le domaine public maritime naturel en raison de la progression du rivage de la mer, en application de l’article L. 2111-4 du code général de la propriété des personnes publiques. Vous avez alors jugé que ces dispositions ne font pas obstacle à ce que des propriétaires obtiennent une réparation dans le cas exceptionnel où le transfert de propriété entraînerait pour eux une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l’objectif d’intérêt général poursuivi par ces dispositions 14.

Cette solution plus restrictive que l’application de la responsabilité sans faute pour rupture de l’égalité de devant les charges publiques de droit commun peut être transposée, plus généralement, aux restrictions à l’usage des biens résultant de l’application des règles de la domanialité publique, eu égard à la protection particulière dont fait l’objet le domaine public. En effet, même en l’absence de disposition législative posant,

comme l’article L. 160-5 du code de l’urbanisme précité pour les servitudes d’urbanisme, un principe de non-indemnisation, les principes d’inaliénabilité et d’imprescriptibilité du domaine public justifient que la responsabilité sans faute de l’État ne puisse être engagée pour rupture de l’égalité devant les charges publiques qu’en cas de caractérisation d’une charge spéciale et exorbitante imposée aux intéressés, qui serait hors de proportion avec l’intérêt général poursuivi par ces dispositions.

Ainsi que le relevait Ronny Abraham dans ses conclusions sous votre décision Bitouzet, une telle charge exorbitante « ne pourra être retenue que dans des cas très exceptionnels », dès lors notamment que « la gravité du préjudice subi ne suffira pas par elle-même à ouvrir le droit à l’indemnité, car il y aura lieu de mettre en balance l’intensité de l’atteinte portée à la propriété privée avec le caractère plus ou moins impérieux de l’objectif d’intérêt public poursuivi ».

Ajoutons que cette solution a le mérite d’assurer strictement la conventionnalité, au regard des stipulations de l’article 1P1, des dispositions nationales régissant le domaine public, la jurisprudence de la CEDH n’exigeant, en substance, d’indemnisation que lorsqu’en l’absence de toute réparation, l’intéressé subirait une charge « spéciale et exorbitante », disproportionnée au regard de l’objectif poursuivi 15.

La ministre est donc fondée à soutenir que la restitution de biens appartenant au domaine public mobilier ne saurait ouvrir droit à réparation, pour leurs détenteurs, que dans le cas exceptionnel où il résulterait des circonstances de l’espèce qu’ils supporteraient sinon une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l’objectif d’intérêt général poursuivi. Elle n’est en revanche pas fondée à faire valoir que la cour aurait commis une erreur de droit, en méconnaissance de cette exigence, en se bornant à caractériser la « charge spéciale et excessive » supportée par le requérant du fait de la restitution du manuscrit, dès lors qu’il ressort de la jurisprudence de la CEDH que celle-ci utilise alternativement les qualificatifs d’exorbitant ou d’excessif pour apprécier la proportionnalité de l’atteinte portée au regard des objectifs d’intérêt général poursuivis. Vous pourrez donc écarter le deuxième moyen de la ministre et en venir à la qualification de la charge subie par le requérant, à la lumière de la jurisprudence de la CEDH.

3.2. Pour apprécier l’existence d’une charge spéciale et exorbitante, la CEDH tient compte, de manière circonstanciée, du comportement des parties à la procédure dans son ensemble, y compris des moyens mis en œuvre par l’État 16. S’agissant du comportement du demandeur, elle apprécie sa bonne foi, les fautes ou imprudences qu’il aurait pu commettre, ainsi que la connaissance qu’il aurait raisonnablement dû avoir des limitations juridiques caractérisant le bien dont il se prévaut 17. Quant au comportement de la puissance publique, la cour apprécie si elle a agi « avec promptitude, de façon correcte et surtout avec la plus grande cohérence » 18.

En l’espèce, pour juger que le requérant était fondé à soutenir que la privation de l’usage du manuscrit litigieux constituait pour lui une charge spéciale et exorbitante la cour a, d’une part, retenu que le manuscrit litigieux avait été acquis par l’aïeul du requérant en 1901 lors d’une vente aux enchères publiques, détenu par la même famille pendant plus d’un siècle et déposé aux archives départementales de Maine-et- Loire pendant vingt-cinq ans, ce qui n’avait pu que conforter le requérant dans sa conviction d’en être le propriétaire. La cour s’est, d’autre part, fondée sur l’absence de toute initiative des pouvoirs publics jusqu’en 2018 pour en revendiquer la propriété, malgré son dépôt aux archives départementales pendant un quart de siècle.

Si la qualification en l’espèce d’une charge exorbitante peut prêter à hésitation, a fortiori au vu de l’usage particulièrement modéré que vous avez fait jusqu’à présent de la jurisprudence Bitouzet, laquelle n’a donné lieu qu’à une application positive 19, nous peinons à voir dans le raisonnement de la cour, au regard de la jurisprudence conventionnelle précitée, une erreur de qualification juridique des faits de l’espèce, tel étant votre degré de contrôle 20, la motivation de la cour étant par ailleurs exempte de dénaturation.

En effet, si la ministre tente de vous convaincre de ce qu’il ne résultait pas de l’instruction que le manuscrit aurait fait l’objet d’une attention particulière de la part du requérant et de sa famille, compte tenu notamment de son dépôt pendant vingt- cinq ans aux archives départementales avec un accès limité, le requérant soutient à l’inverse que la bonne conservation du manuscrit a notamment été permise par la reliure exécutée pour le compte de son aïeul et que son dépôt aux archives départementales visait à le rendre accessible en particulier à des fins de recherche et précisait que toute dépense de restauration ou de conservation demeurerait à sa charge. Nous peinons donc à caractériser au vu des pièces de dossier un désintérêt de l’intéressé susceptible d’être pris en compte pour remettre en cause le caractère exorbitant de la charge subie.

Quant au comportement de l’administration, la ministre fait valoir que le manuscrit était conservé par les archives départe- mentales et non par les services de l’État, de sorte qu’il est illusoire d’estimer que l’État aurait pu intervenir notamment lors de la signature de la convention de dépôt en 1991. Mais il est constant, d’une part, que les archives départementales sont, en application de l’article L. 212-9 du code du patrimoine, dirigés par des conservateurs ou des conservateurs généraux du patrimoine de l’État, d’autre part, que le manuscrit était mis à disposition du public des chercheurs sur autorisation, la ministre relevant elle-même que certains ont pu le consulter.

4. Si vous nous avez suivie jusqu’ici pour considérer que dans les circonstances particulières de l’espèce, le requérant pouvait se prévaloir d’un préjudice spécial et exorbitant du fait de la privation de son intérêt patrimonial à jouir du manuscrit litigieux, hors de proportion avec l’intérêt poursuivi, résultant de l’appartenance du bien au domaine public, vous n’en aurez pas encore fini avec l’examen du présent litige puisqu’il vous restera à vous prononcer sur la consistance de ce préjudice et les modalités de sa réparation. La difficulté de ce dernier exercice ne doit pas pour autant vous décourager d’ouvrir la voie à une possible indemnisation.

4.1. Précisons tout d’abord que nous ne voyons aucune raison d’exclure l’indemnisation à ce titre d’un préjudice moral, si son existence est suffisamment caractérisée par l’intéressé, la CEDH incluant les dommages moraux dans le préjudice indemnisable. C’est donc sans erreur de droit que la cour a considéré que lorsque la perte de l’intérêt patrimonial à jouir d’un bien appartenant au domaine public et restitué de ce fait à l’État apparait susceptible d’ouvrir droit à indemnisation, celle-ci inclut nécessairement le préjudice moral du détenteur, la cour n’ayant ce faisant pas jugé, contrairement à ce que soutient la ministre, que l’existence d’un préjudice moral était nécessairement caractérisée en cas de perte de l’intérêt patrimonial à jouir d’un bien. L’indemnisation d’un éventuel préjudice moral suppose en effet de caractériser un tel préjudice, distinct du préjudice matériel résultant de la perte de la jouissance du bien. En l’espèce, le requérant se prévalait, pour justifier d’un tel préjudice, des conditions qu’il qualifie de « soudaines et virulentes » de la revendication par l’État du manuscrit, la veille seulement de la vente aux enchères publiques au cours de laquelle il devait être vendu, lesquelles avaient préjudicié à sa réputation. Ces circonstances, eu égard à la bonne foi de l’intéressé et à la durée de détention par sa famille du manuscrit litigieux, sont de nature à caractériser un préjudice moral.

4.2. Quant à l’indemnisation du préjudice financier subi par le demandeur, celle-ci ne peut à l’évidence, contrairement à ce que fait valoir le requérant dans son pourvoi incident, correspondre à la valeur vénale du bien, dont le détenteur n’a jamais été propriétaire, compte tenu de son appartenance au domaine public. À cet égard, ce dernier n’est pas fondé à se prévaloir de la jurisprudence rendue par la CEDH au sujet d’atteintes constituées par des mesures de privation du droit de propriété dès lors que la décision de restitution en litige ne constitue pas, ainsi que nous vous l’avons dit, une privation du droit de propriété mais seulement une privation de la jouissance d’un bien qui n’a jamais cessé d’appartenir au domaine public. Vous pourrez ainsi écarter le premier moyen du pourvoi incident, la cour ayant à bon droit jugé que l’indemnisation susceptible d’être accordée au requérant ne saurait être égale au montant total de la valeur vénale estimée du manuscrit.

Si la valeur vénale ne peut donc être retenue, quelle doit-être la juste réparation du préjudice résultant pour le détenteur d’un bien de la perte de la jouissance de celui-ci ?

Soulignons d’abord que le préjudice matériel subi peut résulter de la perte, pour le requérant, d’une source de revenus, ainsi que la CEDH l’a admis s’agissant d’un site rattaché au domaine public maritime mais qui constituait le foyer de l’activité de la société requérante 21. Il peut aussi, plus simplement, résulter de la seule perte du patrimoine que constituait un bien et de l’espérance légitime de pouvoir un jour le céder.

Pour apprécier la juste réparation du préjudice ainsi subi, la CEDH tient compte de la légalité de l’atteinte portée aux biens du demandeur : si elle exige le plus souvent en cas d’expropriation une indemnisation intégrale de la valeur du bien, elle admet que des objectifs légitimes « d’utilité publique » puissent justifier un remboursement inférieur à la pleine valeur marchande 22, exigeant alors le versement d’une « somme raisonnablement en rapport avec la valeur du bien » 23.

4.3. En l’espèce, la cour a retenu une somme de 25 000 €, faisant une appréciation globale des préjudices financier et moral invoqués par le requérant. Celui-ci sollicitait en réparation de son préjudice moral une somme de 50 000 € et se prévalait d’un préjudice financier d’une valeur comprise entre 200 000 et 300 000 €, soit la valeur du manuscrit estimée par un expert, tandis que le conservateur au département des manuscrits de la Bibliothèque nationale de France l’évaluait à 150 000 €, valeur marchande que la cour a retenue.

En accordant une indemnisation égale, en substance, à 10 % de la valeur marchande du manuscrit en litige, ainsi qu’une somme de 10 000 € en réparation du préjudice moral subi par le requérant, qui constitue indéniablement une bien maigre consolation pour ce dernier, la cour nous semble avoir fait une application raisonnable de la jurisprudence précitée de la CEDH étant rappelé que vous n’exercez qu’un contrôle limité à la dénaturation sur le quantum de l’indemnisation.

Il est certes regrettable que la cour n’ait pas davantage justifié le quantum ainsi retenu ni caractérisé le préjudice financier indemnisé mais, outre que ni la ministre ni le requérant ne critiquent l’arrêt pour ce motif, vous admettez, dans certaines matières donnant certes lieu à des contentieux de masse, lorsqu’il s’agit d’indemniser des préjudices qui tout en étant incontestables sont difficiles à chiffrer et juridiquement malaisées à dégager, que soit accordée au demandeur une somme globale en réparation des troubles de toute nature dans les conditions d’existence, catégorie juridique hétérogène qui englobe tant des préjudices matériels que moraux 24. Nous peinons donc en l’espèce à reprocher à la cour de ne pas avoir caractérisé plus avant les préjudices dont elle a admis l’indemnisation.

Par ces motifs, nous concluons au rejet du pourvoi de la ministre ainsi que du pourvoi incident du requérant.


EXTRAITS

[…] Sur le pourvoi principal de la ministre de la culture :

2. Aux termes de l’article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes ».

3. Il découle de ces stipulations que si, en vertu du principe désormais énoncé à l’article L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques, les biens qui relèvent du domaine public des personnes publiques sont inaliénables et imprescriptibles, le détenteur de bonne foi d’un bien appartenant au domaine public dont la restitution est ordonnée peut prétendre à la réparation du préjudice lié à la perte d’un intérêt patrimonial à jouir de ce bien, lorsqu’il résulte de l’ensemble des circonstances dans lesquelles cette restitution a été ordonnée que cette personne supporterait, de ce fait, une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l’objectif d’intérêt général poursuivi. Alors même que le détenteur de bonne foi tenu à l’obligation de restitution ne justifierait pas d’une telle charge spéciale et exorbitante, il peut prétendre, le cas échéant, à l’indemnisation des dépenses nécessaires à la conservation du bien qu’il a pu être conduit à exposer ainsi que, en cas de faute de l’administration, à l’indemnisation de tout préjudice directement causé par cette faute.

4. Il résulte de ce qui vient d’être dit, en premier lieu, qu’en reconnaissant, sur le fondement de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, eu égard notamment à la durée de détention par la famille de M. B… du manuscrit en cause, que celui-ci disposait d’un intérêt patrimonial à en jouir suffisamment reconnu et important pour constituer un bien au sens de ces stipulations et que l’intérêt public majeur qui s’attachait à la restitution à l’État de cette œuvre d’art n’excluait pas, par principe, le versement à son détenteur d’une indemnité en réparation du préjudice résultant de cette perte de jouissance, la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit.

5. En deuxième lieu, en recherchant, pour apprécier si M. B… pouvait, dans les circonstances de l’espèce, prétendre à une indemnisation du fait de la perte de son intérêt patrimonial à jouir du manuscrit, si la privation de ce manuscrit constituait pour lui une charge spéciale et « excessive », et non une charge spéciale et « exorbitante », la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit, eu égard à l’équivalence des deux termes pour la mise en œuvre du régime d’indemnisation en cause.

6. En troisième lieu, la cour administrative d’appel n’a pas entaché son arrêt d’erreur de qualification juridique en jugeant, compte tenu de l’ensemble des circonstances de l’espèce, et notamment de la durée et des conditions de détention de bonne foi du manuscrit par la famille du requérant, ainsi que de l’attitude des pouvoirs publics qui n’en ont jamais revendiqué la propriété jusqu’à la vente aux enchères de 2018, alors qu’ils en avaient eu la possibilité au moins depuis la signature de la convention de dépôt aux archives départementales de Maine-et-Loire en 1991, que la privation de l’intérêt patrimonial à jouir de ce manuscrit constituait en l’espèce, pour M. B…, une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l’objectif d’intérêt général poursuivi.

7. Enfin, la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que la réparation de cette charge spéciale et exorbitante incluait nécessairement l’indemnisation d’un préjudice moral. Elle s’est livrée à une appréciation souveraine des faits de l’espèce, exempte de dénaturation, en jugeant qu’un tel préjudice moral était caractérisé en l’espèce.

8. Il résulte de ce qui précède que la ministre de la culture n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt qu’elle attaque

Sur le pourvoi incident de M. B… :

9. Dès lors que le préjudice financier allégué par M. B… ne résulte pas d’une privation de propriété mais d’une privation de jouissance d’un bien n’ayant jamais cessé d’appartenir au domaine public de l’État, c’est sans erreur de droit que la cour administrative d’appel a jugé que la réparation devait nécessairement être inférieure à la valeur vénale du manuscrit.

10. Si M. B… se prévaut d’une estimation de la valeur vénale du manuscrit, évaluée entre 200 000 et 300 000 euros, pour revendiquer une indemnisation de son préjudice financier à hauteur de 250 000 euros, à laquelle s’ajouterait une indemnisation de son préjudice moral à hauteur de 50 000 euros, la cour administrative d’appel a souverainement fixé, sans dénaturer les faits de l’espèce ni les pièces du dossier, l’évaluation de l’indemnisation de l’ensemble des préjudices à 25 000 euros.

11. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi incident de M. B… doit être rejeté. […]

1 CE, 21 juin 2018, n° 408822, Sté Pierre-Bergé et associés et a. : Lebon, T. p. 678, 689.
2 Ndlr : CE, 4 nov. 2020, n° 42911. V. aussi Cass. 1re civ., 13 févr. 2019, n° 18-13.748 : Dr. Voirie 2019, p. 58, note Chr. Otero.
3 CE, 24 nov. 2014, n° 352402, Sté des Remontées mécaniques Les Houches-Saint Gervais : Lebon, p. 350.
4 CE, 15 mai 2013, n° 354593, Cne de Villeneuve-les-Avignon : Lebon, T. p. 803, 826-827, 871 ; 7 juin 1985, n° 47370, 47594, Sté nationale des chemins de fer français : Lebon, T. p. 624, 774.
5 CE, 21 juin 2018, n° 408822, préc.
6 V. not. CEDH, gr. ch., 29 mars 2010, n° 34044/02, Depalle c/ France et n° 34078/02, Brosset-Triboulet c/ France.
7 V. not. CEDH, plén., 23 sept. 1982, Sporrong et Lönnroth, série A, n° 52. 8 V. not. CEDH, gde. ch., 5 janv. 2000, n° 33202/96, Beyeler c/ Italie.
9 CEDH, 21 mai 2008, n° 35332/05, Anonymos Touristiki Etairai Xenodocheia Kritis c/ Grèce.
10 V. l’arrêt Beyeler c/ Italie précité.
11 CE, 8 avr. 2021, n° 442120, 443279, Sté Bouygues Telecom – Sté Française du Radio-Téléphone : Lebon, T. V. également CE, sect., 3 juill. 1998, n° 158592, Bitouzet : Lebon, p. 288.
12 Sans préjudice des régimes de responsabilité sans faute applicables sans que soit exigée la caractérisation d’un préjudice anormal et spécial (CE, 17 déc. 2008, n° 301705, Garde des Sceaux : Lebon, T.)
13 CE, sect., 3 juill. 1998, n° 158592, préc.
14 CE, 22 sept. 2017, n° 400825, Sté APS : Lebon, T. p. 579, 599, 611.
15 V. not. l’arrêt Depalle c/ France préc., § 91 et 92.
16 V. not. l’arrêt Beyeler c/ Italie, § 114.
17 V. not. l’arrêt Depalle c/ France préc.
18 V. not. l’arrêt Beyeler c/ Italie, préc, § 120.
19 CE, 29 juin 2016, n° 375020, Sté Château Barrault : Lebon, T. La comparaison n’est au demeurant pas topique, s’agissant, pour les servitudes d’urbanisme, de décisions de nature règlementaire, et non comme en l’espèce de décisions individuelles.
20 Relèvent d’un contrôle de la qualification juridique des faits par le juge de cassation l’appréciation du caractère anormal du dommage (CE, 16 déc. 2013, n° 354268 : Lebon, T.), tout comme sa gravité (CE, 24 sept. 2012, n° 339285 : Lebon, T.), ou son anormalité et gravité extrême (CE, 13 juin 2001, n° 210035 : Lebon, T.)
21 CEDH, 23 sept. 2014, n° 46154/11, Valle Pierimpiè Società Agricola c/ Italie.
22 V. not. CEDH, plén., 21 févr. 1986, James et a. c/ Royaume-Uni, série A n° 98.
23 V. not. CEDH, gde ch., 23 nov. 2000, n° 25701/94, Ex-roi de Grèce et a. c/ Grèce.
24 V. en matière de droit au logement opposable CE, 28 juill. 2017, n° 397513 : Lebon, T.

Esther de Moustier : Indemnisation de la perte d'un bien, détenu de bonne foi, restitué au domaine public

Esther de Moustier
Rapporteuse publique